somptuaire est impossible, comme l’impôt progressif est impossible ; et toutes vos divagations sur l’impôt sont des chicanes de procureur. Vous n’avez pas même l’espoir que l’accroissement de la population, divisant les charges, allége le fardeau pour chacun ; parce qu’avec la population s’accroît la misère, et avec la misère, la besogne et le personnel de l’état augmentent.
Les diverses lois fiscales votées par la chambre des députés pendant la session de 1845-46, sont autant d’exemples de l’incapacité absolue du pouvoir, quel qu’il soit et de quelque manière qu’il s’y prenne, à procurer le bien-être du peuple. Par cela seul qu’il est le pouvoir, c’est-à-dire le représentant du droit divin et de la propriété, l’organe de la force, il est nécessairement stérile, et tous ses actes sont marqués au coin d’une fatale déception.
J’ai cité tout à l’heure la réforme du tarif des postes, qui réduit d’un tiers environ le prix des lettres. Assurément, s’il n’est question que des motifs, je n’ai rien à reprocher au gouvernement qui a fait passer cette utile réduction : bien moins encore chercherai-je à en atténuer le mérite par de misérables critiques de détail, vile pâture de la presse quotidienne. Un impôt, assez onéreux, est réduit de 30 p. 100 ; la répartition en est rendue plus équitable et plus régulière : je ne vois que le fait, et j’applaudis au ministre qui l’a accompli. La question n’est pas là.
D’abord, l’avantage dont le gouvernement nous fait jouir sur l’impôt des lettres, laisse entièrement à cet impôt son caractère de proportionnalité, c’est-à-dire d’injustice : cela n’a presque plus besoin d’être démontré. L’inégalité des charges, en ce qui touche la taxe des postes, subsiste comme auparavant, le bénéfice de la réduction étant surtout acquis, non pas aux plus pauvres, mais aux plus riches. Telle maison de commerce qui payait 3,000 fr. de ports de lettres ne payera plus que 2,000 fr. ; c’est donc 1,000 fr. de profit net qu’elle ajoutera aux 50,000 que lui donne son commerce, et qu’elle devra à la munificence du fisc. De son côté, le paysan, l’ouvrier, qui écrira deux fois l’an à son fils soldat, et en recevra pareil nombre de réponses, aura économisé 50 centimes. N’est-il pas vrai que la réforme postale est en sens inverse