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ne change rien à ces relations, puisque, et d’après l’histoire, et d’après la loi écrite, et d’après la théorie économique, le monopole n’existe ou n’est censé exister que postérieurement au travail.

La doctrine de Say est donc hors d’atteinte. Relativement à l’entrepreneur, dont la spécialité suppose toujours d’autres industriels collaborant avec lui, le profit est ce qui reste de la valeur produite, déduction faite des valeurs consommées, parmi lesquelles il faut comprendre le salaire de l’entrepreneur, autrement dire ses appointements. Relativement à la société qui renferme toutes les spécialités possibles, le produit net est identique au produit bruit.

Mais il est un point dont j’ai vainement cherché l’explication dans Say et les autres économistes, savoir, comment s’établit la réalité et la légitimité du produit net. Car il est sensible que pour faire disparaître le produit net, il suffirait d’augmenter le salaire des ouvriers et le taux des valeurs consommées, le prix de vente restant le même. En sorte que rien, ce semble, ne distinguant le produit net d’une retenue faite sur les salaires, ou, ce qui revient au même, d’un prélèvement exercé sur le consommateur, le produit net a tout l’air d’une extorsion opérée par la force, et sans la moindre apparence de droit.

Cette difficulté a été résolue d’avance dans notre théorie de la proportionnalité des valeurs.

D’après cette théorie, tout exploiteur d’une machine, d’une idée ou d’un fonds, doit être considéré comme un homme qui vient augmenter, à frais égaux, la somme d’une certaine espèce de produits, et par conséquent augmenter la richesse sociale en économisant le temps. Le principe de la légitimité du produit net est donc dans les procédés antérieurement en usage : si la combinaison nouvelle réussit, il y aura un surplus de valeurs, et par conséquent un bénéfice, c’est le produit net ; si l’entreprise est appuyée sur une base fausse, il y aura déficit sur le produit brut, et à la longue faillite et banqueroute. Dans le cas même, et celui-ci est le plus fréquent, où il n’existe aucune innovation de la part de l’entrepreneur, comme le succès d’une industrie dépend de l’exécution, la règle du produit net demeure applicable. Or,