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tout émaillé de pages éloquentes, fait honneur à sa littérature : quant à la valeur philosophique du livre, elle serait absolument la même si l’auteur s’était borné à écrire sur chaque page, en gros caractères, ce seul mot : Je proteste.

Résumons :

La concurrence, comme position ou phase économique, considérée dans son origine, est le résultat nécessaire de l’intervention des machines, de la constitution de l’atelier et de la théorie de réduction des frais généraux ; considérée dans sa signification propre et dans sa tendance, elle est le mode selon lequel se manifeste et s’exerce l’activité collective, l’expression de la spontanéité sociale, l’emblème de la démocratie et de l’égalité, l’instrument le plus énergique de la constitution de la valeur, le support de l’association. — Comme essor des forces individuelles, elle est le gage de leur liberté, le premier moment de leur harmonie, la forme de la responsabilité qui les unit toutes et les rend solidaires.

Mais la concurrence abandonnée à elle-même et privée de la direction d’un principe supérieur et efficace, n’est qu’un mouvement vague, une oscillation sans but de la puissance industrielle, éternellement ballottée entre ces deux extrêmes également funestes, d’un côté les corporations et le patronage, auxquels nous avons vu l’atelier donner naissance, d’autre part le monopole, dont il sera question au chapitre suivant.

Le socialisme, en protestant avec raison contre cette concurrence anarchique, n’a rien proposé encore de satisfaisant pour sa réglementation ; et la preuve, c’est qu’on rencontre partout, dans les utopies qui ont vu le jour, la détermination ou socialisation de la valeur abandonnée à l’arbitraire, et toutes les réformes aboutir, tantôt à la corporation hiérarchique, tantôt au monopole de l’état, ou au despotisme de la communauté.