rente, et capable de recevoir toutes les impressions, dispositions et inclinations possibles. La liberté est la faculté d’agir et de n’agir pas, laquelle, par un choix ou détermination (j’emploie ici le mot détermination au passif et à l’actif tout à la fois) quelconque, sort de son indifférence et devient volonté.
Je dis donc que la liberté, de même que l’intelligence, est de sa nature une faculté indéterminée, informe, qui attend sa valeur et son caractère des impressions du dehors ; faculté par conséquent négative au départ, mais qui peu à peu se détermine et se dessine par l’exercice, je veux dire par l’éducation.
L’étymologie, telle que du moins je la comprends, du mot liberté, fera encore mieux entendre ma pensée. Le radical est lib-et, il plaît (cf. allem. lieben, aimer) ; d’où l’on a fait lib-eri, enfants, ceux qui nous sont chers, nom réservé aux enfants du père de famille ; lib-ertas, condition, caractère ou inclination des enfants de race noble ; lib-ido, passion d’esclave, qui ne reconnaît ni Dieu, ni loi, ni patrie, synonyme de licentia, mauvaise conduite. Suivant que la spontanéité se détermine utilement, généreusement, ou en bien, on l’a nommée libertas ; suivant qu’au contraire elle se détermine d’une manière nuisible, vicieuse et lâche, en mal, on l’a appelée libido.
Un savant économiste, M. Dunoyer, a donné une définition de la liberté qui, rapprochée de la nôtre, achèvera d’en démontrer l’exactitude.
« J’appelle liberté ce pouvoir que l’homme acquiert d’user de ses forces plus facilement, à mesure qu’il s’affranchit des obstacles qui en gênaient originairement l’exercice. Je dis qu’il est d’autant plus libre, qu’il est plus délivré des causes qui l’empêchaient de s’en servir ; qu’il a plus éloigné de lui ces causes ; qu’il a plus agrandi et désobstrué la sphère de son action… Ainsi, on dit qu’un homme a l’esprit libre, qu’il jouit d’une grande liberté d’esprit, non-seulement quand son intelligence n’est troublée par aucune violence extérieure, mais encore quand elle n’est ni obscurcie par l’ivresse, ni altérée par la maladie, ni retenue dans l’impuissance par le défaut d’exercice. »
M. Dunoyer n’a vu la liberté que par son côté négatif,