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capitaux et du sol. Pour le travail, le fermier se charge de le fournir ; mais les capitaux ne se forment que par l’épargne ; or, si le fermier pouvait amasser quelque chose, il acquitterait ses dettes. Admettons enfin que les capitaux ne lui manquent pas : de quoi lui serviront-ils, si l’étendue de la terre qu’il cultive reste toujours la même ? C’est le sol qu’il faut multiplier.

Dira-t-on enfin qu’il faut travailler mieux et plus fructueusement ? Mais le fermage a été calculé sur une moyenne de production qui ne peut être dépassée : s’il en était autrement, le propriétaire augmenterait le fermage. N’est-ce pas ainsi que les grands propriétaires de terres ont successivement augmenté le prix de leurs baux, à mesure que l’accroissement de population et le développement de l’industrie leur ont appris ce que la société pouvait tirer de leurs propriétés ? Le propriétaire reste étranger à l’action sociale : mais, comme le vautour, les yeux fixés sur sa proie, il se tient prêt à fondre sur elle et à la dévorer.

Les faits que nous avons observés sur une société de mille personnes se reproduisent en grand dans chaque nation et dans l’humanité tout entière, mais avec des variations infinies et des caractères multipliés, qu’il n’est pas de mon dessein de décrire.

En somme, la propriété, après avoir dépouillé le travailleur par l’usure, l’assassine lentement par l’exténuation ; or, sans la spoliation et l’assassinat, la propriété n’est rien ; avec la spoliation et l’assassinat, elle périt bientôt faute de soutien : donc elle est impossible.


Cinquième proposition.


La propriété est impossible, parce qu’avec elle la société se dévore.


Quand l’âne est trop chargé, il s’abat ; l’homme avance toujours. Cet indomptable courage, bien connu du propriétaire, fonde l’espoir de sa spéculation. Le travailleur libre