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« Un agent de change ou courtier, dit l’article 83 du Code de commerce, ne peut, dans aucun cas et sous aucun prétexte, faire des opérations de commerce ou de banque pour son compte. Il ne peut s’intéresser directement ni indirectement, sous son nom ou sous un nom interposé, dans aucune entreprise commerciale. Il ne peut recevoir ni payer pour le compte de ses commettants. »

L’article 10 de l’arrêté du 27 prairial an X, dont le Code résume et consacre les dispositions, est encore plus explicite.

« Les agents de change et les courtiers de commerce ne pourront être associés, teneurs de livres ni caissiers d’aucun négociant, marchand ou banquier ; — ne pourront pareillement faire aucun commerce de marchandises, lettres, billets, effets publics et particuliers, pour leur compte ; — ni endosser aucun billet, lettre de change ou effet négociable quelconque ; — ni avoir entre eux ou avec qui que ce soit aucune société de banque ou en commandite ; — ni prêter leur nom pour une négociation à des citoyens non commissionnés, sous peine de 3,000 fr. d’amende et de destitution. »

La raison de ces interdictions est facile à comprendre :

« Il ne peut y avoir de sûreté pour le commerçant, dit l’Exposé des motifs, si l’intermédiaire ne conserve pas un caractère de neutralité absolue entre les contractants qui l’emploient. Dès que son intérêt peut être attaché directement ou indirectement à la négociation dans laquelle il s’entremet, il trompe nécessairement une des parties, et souvent toutes les deux. »

Aussi la loi n’admet point de faillites pour ces fonctionnaires.

« En cas de faillite, tout agent de change ou courtier est poursuivi comme banqueroutier. » (Code de comm., art. 89.)

Puisqu’ils ne peuvent faire de marchés, ils ne peuvent rien perdre ; chaque transaction dont ils sont les intermédiaires leur rapporte tant pour cent : ce n’est pas un profit, c’est un honoraire. La faillite de la part de l’agent de change est un vol : le mot de banqueroute est ici trop doux. Aussi l’article 404 du Code pénal dispose-t-il avec raison :

« Les agents de change et courtiers qui auront fait faillite seront punis de la peine des travaux forcés à temps ; — s’ils sont convaincus de banqueroute frauduleuse, la peine sera celle des travaux forcés à perpétuité. »