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Les Compagnies ne l’entendirent pas ainsi. Elles entreprirent d’obliger le gouvernement au remboursement des actions de jouissance, et elles s’armèrent à cet effet de leur droit de tarification. L’élévation des tarifs n’eut plus pour but une augmentation de recettes, mais une interdiction absolue de naviguer ; elles imposèrent au gouvernement l’ordonnance du 17 avril 1843 qui décuplait les droits des bois de construction et triplait ceux des houilles sur le canal du Rhône au Rhin. Les réclamations du commerce devaient, suivant ce chiffre, forcer la main au ministère et l’obliger à rendre au public l’usage des canaux, moyennant indemnité aux Compagnies.

Elles demandèrent en conséquence 40 millions de leurs actions de jouissance. Le ministère accepta le chiffre et proposa par deux fois le rachat à la Chambre, en 1843 et en 1844. La proposition fut repoussée avec vigueur.

Le gouvernement dut alors faire acte d’autorité et rapporter son ordonnance du 17 avril 1843. Et les juifs de crier à la spoliation, et de poursuivre leur but par toutes les tracasseries possibles !

Afin de leur donner satisfaction, une loi du 29 mai 1845 décréta le rachat en principe et détermina le mode d’évaluation de la manière suivante :

« Les droits attribués aux Compagnies par les lois des 5 août 1821 et 14 août 1822, représentés par les actions de jouissance des canaux exécutés par voie d’emprunt, pourront être rachetés par l’État pour cause d’utilité publique. Le prix du rachat sera fixé par une commission spéciale instituée pour chaque Compagnie et composée de neuf membres, dont trois seront désignés par le ministre des finances, trois par la Compagnie, et trois par le premier président et les présidents réunis de la Cour royale de Paris. »

Ce n’était pas le principe, mais le fait que voulaient les Compagnies. Aussi revinrent-elles à la charge.

Deux projets de rachat furent soumis à l’Assemblée en 1850 et 1851 ; la commission chargée de l’examen y substitua un projet d’affermage, qui ne vint pas à discussion.

Enfin le décret du 21 janvier 1852 est venu donner gain de cause aux trois Sociétés les plus importantes.