la prudence des actionnaires et des déposants de sommes en comptes courants, leur dernier recours contre un détournement de destination.
Eh quoi ! vous placez un homme dans la position d’employer sans contrôle des capitaux assez considérables pour diriger le marché à la hausse ou à la baisse ; vous lui donnez la facilité d’opérer pour son compte, non point sur un secret d’État, mais sur une décision bien plus efficace encore, prise à huis-clos, à son instigation ; de jouer contre les actionnaires, contre les prêteurs, contre la Société qu’il représente, de s’acheter à lui-même, en qualité de membre du comité, des valeurs qu’il possède comme simple particulier : et contre les abus d’une telle situation, au milieu d’un monde qui sue le dol et la fraude par tous les pores, vous n’avez qu’un frein, la conscience du mandataire ! Triples sots ! Vous le traiteriez lui-même d’imbécile, s’il s’arrêtait à des scrupules.
Cependant les compagnies de jeu, car celles qui nous occupent ne sont pas autre chose, distribuent des dividendes merveilleux. Celui du Crédit mobilier a été de 203 fr. 70 en 1855. M. Amail a voulu essayer ses forces au préalable sur un fonds commun, dont il a tiré 27 0/0 en cinq mois ; c’est sur la foi de cette expérience qu’il s’est décidé à mettre en commandite son habileté, sa prudence, et la vertu bien connue de M. Jourdan ! La Société Mirès a donné 69 fr. en 1854, 79 90 en 1855 ; la Société Vergniolle 20 0/0.
Certes la prospérité de l’entreprise est trop de l’intérêt des directeurs pour qu’ils la laissent péricliter ; c’est le levier qui fait toute leur force, sans lequel ils ne seraient, comme M. Tartempion et M. Coquardeau, que de simples joueurs, ballottés sans boussole au milieu des tempêtes et des écueils. Mais les directeurs n’ont-ils fait d’autres profits que le tant pour cent réservé à la gérance ? Ont-ils spéculé pour leur compte ?
Les 240,000 actions des immeubles Rivoli ont primé en moins d’un an de 70 fr. C’était une affaire menée par le Crédit mobilier. À ce taux, c’était un bénéfice de 16,800,000 fr. ou 70 0/0. Si le Crédit mobilier rendait des comptes, nous