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L’objet de ces diverses entreprises est le même : acheter et vendre, vendre et acheter des valeurs et effets publics ; acheter en baisse, vendre en hausse, encaisser des primes ; agioter avec le moins de risques possible, conformément au principe de la spéculation expectante. (Voyez p. 119.)

Pour ce faire, voici la combinaison aussi simple qu’habile imaginée par ces compagnies, ou mieux, empruntée à la Société type, le Crédit mobilier.

On fait appel aux actionnaires, qui viennent échanger leur argent contre des actions, du papier, s’enlevant ainsi à eux-mêmes le moyen d’agir sur la place : une concurrence de moins. On concentre dans les mains de quelques directeurs 5 millions (Société Vergniolle), 25 millions (Société Amail), 50 millions (Société Mirès) ; on centuple leur action : coalition de plus. On nomme un comité de direction.

« La position de membre du comité de direction, dit le Journal des Chemins de fer, à propos de la déconfiture de M. Place, est généralement enviée, parce qu’elle donne le secret des opérations, qui ne sont pas ordinairement connues des autres administrateurs. Le comité de direction connaît seul la situation de la place ; il détermine l’action que la Compagnie doit exercer sur elle, soit qu’il facilite par des reports une situation tendue, soit que les nécessités ou des combinaisons d’un autre genre l’obligent d’abandonner le marché à ses propres ressources ; enfin il sait si la Société est en mesure de pallier cette situation en donnant à bon marché les capitaux nécessaires à la liquidation.

« La situation particulière où se trouve ce comité, le mettant à même de prévoir les mouvements de la Bourse, donne aux administrateurs qui en font partie un crédit, une importance qui expliquent la confiance dont ils sont investis et la facilité avec laquelle un certain nombre de banquiers ont donné à M. Place des sommes considérables pour les faire valoir.

« Or de deux choses l’une : ou ces capitaux ont été confiés à M. Place pour les faire valoir dans des affaires industrielles, et alors on s’étonnera que ces capitaux n’aient pas été mis dans les affaires faites par le Crédit mobilier lui-même ; ou bien ces capitaux ont été destinés à des opérations de Bourse, et l’on regrettera que des sommes aussi considérables aient été détournées des grandes entreprises industrielles pour être portées vers le jeu. »

On s’étonnera, on regrettera, voilà donc le dernier mot de