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dans l’étude purement abstraite des lois, prétendent faire de nos codes, renouvelés des Douze tables, la règle éternelle des relations économiques, la pratique, plus inventive, s’écarte chaque jour davantage de formules surannées et devenues gênantes, et accuse à chaque pas l’insuffisance du droit.

Pour se faire une idée des changements profonds qu’a subis notre économie, il suffit de comparer les lenteurs et les formalités du Code civil sur le prêt et les mutations de propriété, avec les formes expéditives de la spéculation, qui permettent à des milliards de valeurs de circuler et de s’échanger en quelques instants, sans acte notarié ni sous-seing privé, sans enregistrement, par la simple tradition d’un titre.

Le tableau des valeurs négociables, s’il était possible de le donner complet, ne serait pas autre chose que la statistique du commerce et de la production de la France. On sait de notre pays son organisation administrative, judiciaire, militaire, religieuse. La France économique n’est pas connue. Partout encore la politique prime le travail et aspire à lui dicter des lois ; l’homme d’État est plus considéré que l’industriel ; les intrigues de la diplomatie ont le secret de nous passionner, tandis que les questions de douane et de libre échange, d’importation et d’exportation, de crédit et de salaire, nous trouvent indifférents.

Cependant, le travail, c’est la richesse ; et l’État, c’est l’impôt. Sans prétendre dénier à