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dessous de lui. Ses ministres l’avouent ; ses ex-ministres le répandent ; la France le sait ; le gamin de Paris le répète ; personne, personne ! n’a pour lui une parole d’estime. Lafayette, Dupont (de l’Eure), Laffite, C. Périer, ont dit de lui tour à tour, empruntant pour le peindre le langage des halles : Le b…… nous trompe ! Et cela a duré dix-huit ans ! Tout ce qu’il y eut en France de généreux, de vital, d’héroïque, s’est pulvérisé devant cette influence dévastatrice ; tout a été gangrené ; la corruption nous est sortie par le nez et par les oreilles ; et, pendant dix-huit ans, la France ne s’est point émue. Et aujourd’hui qu’il est tombé, aujourd’hui que la République a écrasé l’infâme, la France le regrette encore ! Est-ce donc que tout ne serait pas fini ?... Non, pour l’honneur de ma patrie, pour le respect du nom français, je ne puis croire à une telle puissance du mal. Cet homme que vous chargez de vos iniquités, que vous accusez de vos misères, n’est à mes yeux que l’Attila des fausses consciences, le dernier fléau de la justice révolutionnaire.

Briser les caractères, ruiner les convictions, ramener tout au positivisme mercantile, tout à l’argent, jusqu’au jour où une théorie de l’argent signalerait l’heure et le principe de la résurrection : ce fut l’œuvre de Louis-Philippe, c’est sa gloire. Ce que je vois reprocher à Louis-Philippe de petitesse de vues, de ruse mesquine, de trivialité, de commérage, de goût faux, de faconde creuse, de philanthropie hypocondre, de complaisances bigotes, tout cela me paraît sublime d’ironie et d’à-propos. Que voulez-vous de plus écrasant pour votre régime parlementaire et bavard, que ces discours de la couronne qui ne disent rien, précisément parce que des législateurs à 500 francs de contribution comme à 25 francs d’indemnité, n’ont et ne peuvent avoir rien à dire ?

La vie de Louis-Philippe serait incomplète ; il aurait manqué quelque chose à son règne, s’il n’eût pas à la fin trouvé