séqué, tout détruit ; que le chaos est partout, de quelque côté qu’on se tourne, si bien enfin, que pour conserver un reste de paix et d’ordre dans ce monde ébranlé, il n’est plus de ressource que l’arbitraire. Dans cette incertitude, où la réflexion n’indique rationnellement aucun choix, où la logique prouve que le blanc et le noir sont égaux, qui vous décidera, si ce n’est votre intérêt ?
Laissez donc faire, laissez passer tout le monde et toutes choses, et contentez-vous d’essuyer vos éclaboussures. Ni chrétien, ni juif ; ni royaliste, ni démocrate ; ni académicien, ni romantique ; Chacun chez soi, chacun pour soi ; Dieu, c’est-à-dire la Fortune, pour tous, et l’intolérance seulement pour les intolérants. Celui-là seul est mauvais citoyen, qui ne sait vivre dans un milieu où il y a place honorable même pour les voleurs et les prostituées.
Voilà la ligne inflexible, providentielle, que prescrivait de suivre au monarque la Charte de 1830. Dernier terme d’une série révolutionnaire, cette Charte était comme un jugement de Némésis, nous condamnant à boire la ciguë. Louis-Philippe n’a fait autre chose que nous présenter la coupe : jadis le rôle de bourreau faisait partie des prérogatives royales.
De tous les reproches qu’on a faits au gouvernement de Louis-Philippe, un seul, peut-être, serait sérieux, s’il était justifié : c’est celui qu’adressait au ministère Molé, si je ne me trompe, l’opposition Thiers-Barrot « Nous ferions les mêmes choses que vous, disaient-ils, mais nous les ferions mieux que vous ! » Cela se comprend : le système admis, le débat ne roule plus que sur l’exécution. Louis-Philippe a mis dix-huit ans à démoraliser la France : c’est trop longtemps. Il en a coûté pour cela au pays, chaque année, 1,500 millions : c’est trop cher. Quel malheur que M. Odilon Barrot n’ait été fait ministre que sous la République !
Qu’avaient-ils donc à reprocher à l’homme selon leur