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lait la Révolution, n’eût pas raison de la faire : je dis seulement que le gouvernement, en faisant résistance, obéissait à sa nature, et c’est ce que nos pères ne comprirent pas. Au lieu de punir un homme, de condamner une forme, c’était le principe qu’il fallait atteindre, le gouvernement qu’il fallait offrir en holocauste à la Révolution. Il fallait se demander, non pas si la dynastie des Bourbons, si la monarchie constitutionnelle, pouvait servir les nouveaux intérêts ; mais si l’ordre politique, l’organisation d’une autorité publique, de quelque nature qu’elle fût, était compatible avec les idées que venait consacrer la Révolution. Les fédérations ou fraternisations qui se formèrent spontanément de toutes parts, mettaient sur la voie : elles prouvaient que la souveraineté du Peuple n’est autre chose que l’harmonie des intérêts, résultant d’un libre contrat, et que la centralisation des pouvoirs, telle du moins qu’elle est entendue et pratiquée par nos hommes d’État, est l’aliénation même des libertés. Alors, au lieu de revenir au régime politique, on eût cherché le régime économique ; au lieu de reconstituer le Pouvoir, on aurait cherché la méthode à suivre pour en voir plus tôt la fin. Après la négation l’affirmation : ce que le Peuple venait de détruire, il le remplaçait, non par un replâtrage, mais par une autre institution.

Il n’en fut pas ainsi, le préjugé gouvernemental était trop puissant encore pour que l’idée révolutionnaire fût comprise dans sa plénitude. Le mouvement, à peine commencé, s’arrêta. Toutes les péripéties révolutionnaires dont nous avons été témoins, à partir du 14 juillet 1789, ont eu pour cause cette préoccupation.

Le pouvoir, disait-on, existe depuis un temps immémorial. Le gouvernement est indispensable à la société. Quelques-uns, tels que Robespierre, entrevoyaient bien la possibilité d’en modifier la forme : personne n’eût voulu le supprimer. L’ancien régime aboli officiellement, on crut