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dérées à une multitude de points de vue divers, le socialisme n’est pas seulement l’extinction de la misère, l’abolition du capitalisme et du salariat, la transformation de la propriété, la décentralisation gouvernementale, l’organisation du suffrage universel, la souveraineté effective et directe des travailleurs, l’équilibre des forces économiques, la substitution du régime contractuel au régime légal, etc., etc. Il est, dans toute la rigueur des termes, la constitution des fortunes médiocres, l’universalisation de la classe moyenne. C’est l’application, dans toutes ses conséquences, de l’ancien axiôme, Suum quique, À chacun ce qui lui revient, ou comme l’a interprété la première école socialiste, À chacun suivant sa capacité, à chaque capacité suivant ses œuvres : ce qui indique un juste-milieu, naturel et providentiel, dans les travaux et les récompenses.

Qui ne voit que ce besoin, devenu si poignant, d’une pondération des forces économiques et d’une distribution plus équitable des biens de la nature et des produits de l’industrie est le résultat du mouvement accompli pendant les 60 dernières années ?

L’Assemblée constituante, en décrétant la vente des biens nationaux et la liberté de l’industrie, en introduisant dans le droit public le principe de l’égalité devant la loi, avait créé, au moins pour un temps, une certaine égalité dans les fortunes. Sous l’Empire, l’imperfection de l’œuvre révolutionnaire fut à peine sensible : les distractions de la gloire ne laissaient pas le temps de réfléchir aux vices de l’économie publique. Mais, quand la Restauration vint donner l’essor aux facultés industrielles du pays, la tendance capitaliste et agglomératrice ne tarda pas à se révéler. C’est alors que commença de grossir la classe des salariés, le prolétariat, en même temps que se reformait, sur les bases de la féodalité mercantile, la féodalité terrienne, la grande propriété. Pour quiconque a réfléchi sur l’action combinée