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contre lui-même, en un mot contre le principe d’autorité. La déchéance du capital et la fin du pouvoir, voilà la conclusion suprême du dilemme posé par l’élection du 10 décembre, développé avec une effrayante énergie par les ministres de Louis Bonaparte, et passé en acte par la manifestation du 13 juin.

Forcé de soutenir la légitimité de son succès, le pouvoir a intenté aux Manifestants du 13 juin un procès criminel. Qui a-t-il pensé convaincre par cette opiniâtreté d’amour-propre ? Le procès de Versailles est un fait de plus à ajouter à cette longue conspiration du gouvernement contre lui-même, dans laquelle nous l’avons vu tour à tour, le 29 janvier, attenter à la dignité du pouvoir législatif ; le 21 mars, attenter aux institutions ; le 16 avril, déclarer la guerre aux idées. Après le 13 juin, il fait la guerre aux hommes : croyez-vous qu’il en ait pour longtemps ? Quoi qu’ait fait le ministère public pour établir son accusation de complot, la conscience publique s’est rangée du côté des accusés : inattaquables sur le fond, il ne leur restait qu’à triompher sur la forme : ils ne l’ont pas voulu !...

Il semblait, il y a quelque temps, que le pouvoir, malgré son ostentation de légalité, voulût faire retraite. Le Président de la République s’était élevé avec force contre les coups d’État ; il avait écrit, sur les affaires de Rome, une lettre, la seule pièce honorable pour le gouvernement de tout le dossier de Versailles, par laquelle il témoignait de sa ferme volonté d’assurer aux Romains des institutions libérales. Plus tard, sur l’avis d’un ministre, les conseils généraux avaient écarté, à la presque unanimité, le projet de modifier immédiatement la Constitution. Enfin le 31 octobre, un message énergique de Louis Bonaparte, tombant comme un pavé au milieu de l’Assemblée nationale, fut pris un moment pour le programme de la Révolution !...

Ces bonnes dispositions ont vite disparu. Un moment la