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sation. Voici le mot de l’énigme, qui vous servira pour résoudre tous les problèmes du même genre.

« La loi, — dit le Code d’instruction criminelle, art. 342, — ne demande pas compte aux jurés des moyens par lesquels ils se sont convaincus ; elle ne leur prescrit point de règles desquelles ils doivent faire particulièrement dépendre la plénitude et la suffisance d’une preuve. Elle ne leur dit point : Vous tiendrez pour vrai tout fait attesté par tel ou tel nombre de témoins. Elle ne leur dit pas non plus : Vous ne regarderez pas comme suffisamment établie tout preuve qui ne sera pas formée de tel procès-verbal, de telles pièces, de tant de témoins ou de tant d’indices. Elle ne leur fait que cette seule question, qui renferme toute la mesure de leurs devoirs : Avez-vous une intime conviction ? »

Comprenez-vous maintenant ? On dit aux jurés : Avez- vous l’intime conviction que le citoyen P.-J. Proudhon ici présent est un sujet dangereux pour l’État, incommode aux jésuites, inquiétant pour vos capitaux et vos propriétés ? Peu importe qu’il existe ou n’existe pas de corps de délit, que le ministère public n’apporte aucune preuve de son accusation, que les motifs sur lesquels il s’appuie soient sans rapport avec les crimes et délits imputés à l’accusé. La loi ne vous demande pas compte des moyens par lesquels vous vous serez convaincus ; elle ne prescrit point de règles à votre jugement. Et quand même ledit Proudhon vous démontrerait, — il en est fort capable, — que les faits mentionnés dans l’acte d’accusation sont controuvés et travestis ; quand il établirait, par pièces et témoignages, qu’il a fait tout le contraire de ce dont on l’accuse, et que c’est Louis Bonaparte lui-même qui, dans les articles incriminés, attaque la Constitution, provoque les citoyens à la guerre civile, démolit l’Église et le gouvernement, et met en péril la propriété, vous n’êtes point tenus de vous en rapporter à de