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Là, le gouvernement, l’État, le pouvoir, quel que soit le nom que vous lui donniez, ramené à ses justes limites, qui sont, non de légiférer ni d’exécuter, pas même de combattre ou de juger, mais d’assister, comme commissaire, aux prêches, s’il y a des prêches ; aux débats des tribunaux et aux discussions du parlement, s’il existe des tribunaux et un parlement ; de surveiller les généraux et les armées, si les circonstances obligent de conserver des armées et des généraux ; de rappeler le sens des lois et d’en prévenir les contradictions ; de procurer leur exécution, et de poursuivre les infractions : là, dis-je, le gouvernement n’est autre chose que le proviseur de la société, la sentinelle du peuple. Ou plutôt, le gouvernement n’existe plus, puisque, par le progrès de leur séparation et de leur centralisation, les facultés que rassemblait autrefois le gouvernement, ont toutes, les unes disparu, les autres échappé à son initiative : de l’an-archie est sorti l’ordre. Là, enfin, vous avez la liberté des citoyens, la vérité des institutions, la sincérité du suffrage universel, l’intégrité de l’administration, l’impartialité de la justice, le patriotisme des baïonnettes, la soumission des partis, l’impuissance des sectes, la convergence de toutes les volontés. Votre société est organisée, vivante, progressive ; elle pense, parle, agit comme un homme, et cela précisément par ce qu’elle n’est plus représentée par un homme, parce qu’elle ne reconnaît plus d’autorité personnelle, parce qu’en elle, comme en tout être organisé et vivant, comme dans l’infini de Pascal, le centre est partout, la circonférence nulle part.

C’est à cette constitution anti-gouvernementale que nous conduisent invinciblement nos traditions démocratiques, nos tendances révolutionnaires, notre besoin de centralisation et d’unité, notre amour de la liberté et de l’égalité, et le principe purement économique, mais si imparfaitement appliqué, de toutes nos constitutions. Et c’est ce que j’eusse