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capable de légitimer une révolution, n’est ni cette violence brutale qui dévaste les palais, incendie les châteaux ; ni cet entraînement fanatique qui, après avoir fait un 17 mars, un 16 avril et un 15 mai, met le comble à ses bévues par un 10 décembre ; ni l’oppression alternative des majorités par les minorités, des minorités par les majorités ? Où donc est la souveraineté, la raison du peuple ? La Constitution consacre sa propre révision ; tous les partis s’apprêtent à faire cette révision dans le sens de leurs intérêts : montrez-moi, dans ce conflit d’idées, la volonté, la vraie volonté du pays ?

Avais-je donc tort de dire à ces fabricateurs de décrets :

« Ah ! grands politiques, vous montrez le poing au capital, et vous voilà prosternés devant la pièce de cent sous ! Vous voulez exterminer les Juifs, rois de l’époque, et vous adorez (en jurant, c’est vrai !) le Veau d’or ! Vous dites, ou vous laissez dire, que l’État va s’emparer des chemins de fer, des canaux, de la batellerie, du roulage, des mines, des sels ; qu’on n’établira plus d’impôts que sur les riches, impôt somptuaire, impôt progressif, impôt sur les domestiques, les chevaux, les voitures et tous les objets de prix ; qu’on réduira, avec le nombre des emplois, le chiffre des traitements, les rentes, la propriété. Vous provoquez la dépréciation de toutes les valeurs financières, industrielles, immobilières ; vous tarissez la source de tous les revenus ; vous glacez le sang dans les veines au commerce, à l’industrie, et puis vous conjurez le numéraire de circuler ; vous suppliez les riches épouvantés de ne pas le retenir. Croyez-moi, citoyens dictateurs, si c’est là toute votre science, hâtez-vous de vous réconcilier avec les juifs ; renoncez à ces démonstrations de terrorisme qui font courir les capitaux après la révolution comme les chiens après les sergents de ville. Rentrez dans ce statu quo conservateur au delà duquel vous n’apercevez rien, et dont vous n’auriez jamais dû sortir ; car, dans la situation équivoque où vous êtes, vous ne