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Je veux dire à Louis-Napoléon la bonne aventure. Je ne fais à mes prédictions qu’une réserve ; c’est qu’il reste parfaitement le maître, à ses risques et périls, de me faire mentir, et de tromper l’irrévocable destin. Le décret est inflexible : mais l’homme a la liberté de désobéir, sur la perte de son âme ! Car, disait la loi des XII Tables, interprète de l’éternelle Providence, « Quiconque manquera à la loi » sera sacré, » c’est-à-dire, dans le langage antique, imité plus tard par l’Eglise, dévoué aux dieux infernaux, anathème. Qui secus faxit, sacer esto !

Combien, depuis 60 ans, ont été ainsi sacrés, pour leur ignorance aussi bien que pour leur rébellion ! Louis XVI, Sacer esto ! Napoléon, Sacer esto ! Charles X,Sacer esto ! Louis-Philippe, Sacer esto ! Et parmi les républicains, la Gironde, Danton, Robespierre, Ledru-Rollin, Cavaignac, chacun avec les siens. Rien n’a pu les sauver, ni leur éloquence, ni leur énergie, ni leur vertu. Qu’ils n’aient pas vou1u, ou qu’ils n’aient pas compris, l’arrêt a été le même : Sacri sunto !

Louis-Napoléon a aussi son mandat, d autant plus impératif, qu’il se l’est adjugé de vive force. Le connaît -il ? Dans le discours d’ouverture du Corps législatif, il a laissé entendre que si les partis n’étaient pas sages il pourrait se faire empereur, sinon, qu’il se contenterait du titre de Président. Eh quoi ! Prince, vous ne savez pas au juste ce que vous représentez, l’Empire ou la République ! À peine entré dans le labyrinthe, vous avez perdu votre fil ! Comment donc espérez -vous de vaincre le Minotaure ? Prenez garde que le sang des martyrs du 2 décembre ne s’élève contre vous : Sacer esto !