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universel, en le présentant au peuple comme l’instrument infaillible de la révolution sociale. Or, la loi du 31 mai ayant réduit d’un tiers, et dénaturé par le système des exclusions, le suffrage universel ; la démocratie, de son côté, faisant du maintien de cette loi un casus belli pour 1852, l’occasion était décisive pour Louis Bonaparte. Sa réélection dépendant de sa popularité, et sa popularité de la conduite qu’il allait tenir sur le rétablissement du suffrage universel, toute la question pour lui était de savoir si, en appuyant la loi que ses ministres avaient votée, il se ferait le Monck d’une nouvelle restauration ; ou bien si, en se joignant aux républicains, il deviendrait une seconde fois le chef visible de la révolution. Avec la majorité royaliste, Louis Bonaparte descendait du fauteuil, comme Cincinnatus, Monck, Washington, tout ce qu’on voudra, n’emportant pas même une pension de retraite ; joint aux démocrates, c’est-à-dire au principe démocratique, il était à la tête d’une force supérieure, et sans concurrent possible. La constitution lui donnait congé, sans doute ; mais le peuple le rappellerait !… Que Louis Bonaparte, en vertu de son initiative, proposât donc l’abrogation de la loi du 31 mai, et mît ainsi la cause du suffrage universel sous sa protection : toute sa popularité lui revenait à l’instant ; il devenait, ipso facto, et malgré tout, maître de la position.

Et d’abord il gagnait à cette conduite deux avantages immenses : le premier, de faire voter avec lui, pour lui, quelque répugnance qu’elle en eût, toute la gauche, et par là de se montrer aux yeux du peuple comme le chef de la révolution, puis-