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foi perpétuelle de l’humanité. Un système détruit, ils en cherchent un autre ; ils ont besoin de sentir leur esprit dans des universaux et des catégories, leur liberté dans des interdictions et des licences. Chose étonnante, la plupart des révolutionnaires ne songent, à l’instar des conservateurs qu’ils combattent, qu’à se bâtir des prisons ; ils ressemblent au compagnon, qui va d’auberge en auberge, d’atelier en atelier, amassant quelques écus, se perfectionnant dans son état, jusqu’à ce qu’enfin, de retour au pays, il tombe… en ménage !

Rien n’est plus faux que cette conception du progrès social.

Le premier travail de toute société est de se faire un ensemble de règles, essentiellement subjectives, œuvre des esprits spéculatifs, admise par le vulgaire sans discussion, que justifie la nécessité du moment, qu’honore de temps à autre l’habileté de quelque prince juste ; mais qui, n’ayant pas de fondement dans la vie de l’espèce, dégénère tôt ou tard en oppression. Aussitôt commence contre le pouvoir un travail de négation qui ne s’arrête plus. La liberté, prise pour contrôle, tend à occuper toute la place : tandis que le politique s’efforce de réformer l’état et cherche la perfection du système, le philosophe s’aperçoit que ce prétendu système est néant ; que la véritable autorité, c’est la liberté ; qu’au lieu d’une constitution de pouvoirs créés, ce que cherche la société est l’équilibre de ses forces naturelles.

Il en est ainsi, du reste, de toutes les choses qui procèdent de la pure raison. D’abord ces constructions semblent nécessaires, douées du plus haut degré de positivisme, et la question paraît être uni-