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vants, aussi artistes, aussi puissants inventeurs, aussi grands capitaines, aussi profonds hommes d’État, que leurs cousins de la classe gouvernante et bourgeoise.

Je n’ai nulle envie de rallumer des discordes éteintes. Je sais que je n’écris point un article du Représentant du Peuple, qu’il n’y a plus de multitude qui me lise, et que je remuerais en vain ce foyer qui n’est que cendre. La classe la plus nombreuse et la plus pauvre, cette grande armée du suffrage universel, que nous avons essayé d’affranchir par sa propre initiative, a donné par deux fois, au 10 décembre 1848 et au 20 décembre 1851, une réponse telle que la comportait l’état de son âme, la poésie de ses souvenirs et la naïveté de ses sentiments. Le peuple français, pour quelque temps encore, entend qu’on le gouverne, il ne m’en coûte rien de l’avouer, et il cherche un homme fort ! Il a dévolu sa souveraineté au nom qui lui représentait la force : quelle idée d’avoir voulu faire, de cet enfant, un souverain ! quelle fiction lamentable dans la série déjà si longue de nos fictions !… Je n’appellerai pas de ce plébiscite, qui me met à l’aise, et je n’entends en aucune façon infirmer le vote du 20 décembre. Le peuple, si ce n’est par raison, au moins par instinct, sait ce qu’il fait ; seulement ce qu’il sait n’est pas à la hauteur de ce que nous, les gens de la classe moyenne et les bourgeois, nous savons. Ce ne sont pas les actes du peuple, parfaitement authentiques, quoi qu’on dise, et trop faciles à prévoir, que je discute. Je me demande : Comment, au 24 février, les chefs de la démocratie ont-ils résigné leurs pouvoirs entre les mains d’un pareil