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que le Saint-Père nous fait baiser ses mules, voici le prophète Mazzini qui nous présente l’éponge de fiel, et prononce sur nous le Consummatum est ! Quel triomphe, dans toute l’Europe, pour l’envie ! et quelle leçon à la postérité ! La France de 1848, la fille de 92 et de 1830, eh bien ! cette France émancipatrice, un moment adultère, met au monde le socialisme ; et tout aussitôt elle trahit les nationalités, elle assassine les républiques, s’agenouille devant le cadavre de la papauté, embrasse le fantôme de la tyrannie, et meurt !…

Oh ! si je n’avais qu’à répondre à des pédants ignares ! s’il ne s’agissait pour moi que de flageller une fois de plus ces mystagogues, sycophantes des révolutions qu’ils n’ont pas prévues et qui les dépassent !… — Mais un devoir plus sérieux me commande. Il faut justifier ma nation devant l’histoire, lui ôter ce poids d’infamie, dont ses rivales espèrent l’écraser. Un seul jour de remords pour la France ! c’est cent mille fois plus que la passion de l’Homme-Dieu… Oublions donc tous, s’il se peut, nos griefs ; raisonnons de sang-froid, repassons les faits et les causes. Que l’histoire, nous montrant dans nos erreurs les causes de nos défaites, nous apprenne enfin à les réparer. Qu’au feu de l’adversité disparaissent parmi nous les partis et les sectes ; que l’intolérance soit flétrie, qu’on n’estime plus que la liberté !

Le 24 février 1848, une poignée de républicains, franchissant les limites de la protestation bourgeoise, renverse le trône et dit au peuple : Sois libre !

C’était hardi, cela aurait été sublime, si, avec moins de modération et d’honnêteté, je le ferai voir