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tion. Il n’aperçoit pas un seul instant qu’en excluant de cette manière les Anglais de l’Europe, c’est l’Europe elle-même qu’il va séquestrer du reste du monde, c’est le monopole du globe qu’il assure au Anglais, et en fin de compte la prépondérance de la Grande-Bretagne, l’infériorité du continent, et sa propre incapacité qu’il signe. L’esprit de l’Empereur est fermé, bloqué, sur toutes choses : d’où saurait-il, d’ailleurs, que la méthode des mathématiciens ne peut s’appliquer aux choses de la raison pure, et qu’une idée désignée par A dans son expression élémentaire, poussée à sa dernière conséquence devient Z, c’est-à-dire, une contradiction ?... Pendant dix ans le Blocus continental, contrepartie de la centralisation politique qu’il tenait aussi des jacobins, — deux idées contradictoires, deux antinomies ! — voilà, au dehors et au dedans, tout le fond de la politique impériale ; voilà ce que devient, dans la personnalité d’un homme, le génie de la révolution !

Dix ans de luttes avaient déprimé toutes les intelligences : le génie politique de 89 était tombé tour à tour du fanatisme de Babeuf aux platitudes des théophilanthropes. L’idée mère de la grande époque, GOUVERNEMENT REPRÉSENTATIF, machine d’investigation sociale plutôt qu’institution véritable, cette idée, dis-je, trahie par l’ancienne royauté, déconsidérée par les scènes de la Constituante, de la Législative, de la Convention, niée par les coups d’état du Directoire, était obscurcie. Il n’eût pas moins fallu, en 99, que le génie de Mirabeau et le bras de Bonaparte pour la remettre à flot dans l’opinion et lui restituer son éclat : l’homme du