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qu’avons-nous de mieux à faire, socialistes et non-socialistes, radicaux et modérés, que d’étudier sans relâche l’immense problème, de chercher la conciliation de nos idées, et, sans attendre que des chefs plus aimés nous arrivent, d’exercer dès maintenant sur le pouvoir, quel qu’il soit, la pression légitime, incessante, de la science et du droit ? Que Louis-Napoléon, puisqu’il est en ligne, devienne, s’il veut, par le mandat révolutionnaire qu’il s’est donné le 2 décembre, plus grand que ne fut l’Empereur ; qu’il accomplisse l’œuvre du dix-neuvième siècle ; surtout qu’il ait l’orgueil de ne rien laisser à faire à son successeur, et qu’après lui la nation rendue à elle-même, fortement constituée dans son économie, n’ait plus à redouter, de la part d’un parti, d’une secte, ou d’un prince, ni usurpation, ni restauration, ni dictature ; qu’elle puisse dire adieu à la politique : et je ne serai point, quant à moi, détracteur de Louis-Napoléon. Je ferai le décompte de ses torts envers la démocratie au fur et à mesure de ses services ; je lui pardonnerai son coup d’état, et lui rendrai grâce d’avoir donné au socialisme certitude et réalité.

Mais que parlé-je toujours de socialisme ? Je voudrais que ce sobriquet d’origine contre-révolutionnaire, que le peuple accepta en 48 comme il avait accepté en 93 celui de sans-culotte, et qui rend tout aussi mal l’idée du siècle, eût fait son temps. La période d’agitation qu’il exprimait est finie, et la question soulevée par lui tellement posée qu’aucun ordre du jour ne l’écartera plus. Sans la persécution dont il est le prétexte, j’abandonnerais, peut-être, ce mot de passe de la révolution économique,