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plus haut, un sort est jeté sur les chefs politiques de la France : ce sort, c’est le problème du prolétariat, la fin de la politique, l’idée sociale. C’est pour cela que la mission de Louis-Napoléon n’est pas autre que celle de Louis-Philippe et des républicains, et ceux qui viendront après lui n’en auront pas d’autre à leur tour. En politique, on n’est pas l’héritier d’un homme, on est le porteur d’une idée. Celui qui la réalise le mieux, c’est celui-là qui est l’héritier légitime.

Qu’importe donc que l’idée sociale ne soulève plus dans la presse d’irritants débats, qu’elle ait cessé de passionner la multitude, que le capitaliste se croie délivré du cauchemar, que les commissaires de Louis-Napoléon le félicitent dans leurs rapports d’avoir terrassé le monstre, comme ces médailles, frappées à l’effigie de je ne sais plus quel césar, le glorifiaient d’avoir aboli le nom chrétien, nomine christianorum deleto ; qu’importe tout cela, dis-je, si, en croyant frapper le socialisme on n’a fait qu’en répercuter le venin ; si la pensée qui errait à la surface a gagné déjà les parties nobles ; si le pouvoir qui devait l’écraser n’exprime, en résultat, par le fait de son institution, par ses besoins, malgré ses protestations officielles et ses proscriptions officieuses, que le socialisme, l’absorption de la politique dans l’économie ; si Louis-Napoléon, dans les plus importants de ses décrets, manifeste la tendance irrésistible qui le pousse à la révolution sociale ?

Non, le socialisme n’est pas vaincu, puisqu’il n’est pas résolu ; puisqu’il n’a rencontré jusqu’à présent que des injures et des baïonnettes ; puisque