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Pour lui, de même que pour le vulgaire, l’élu du peuple n’est point, comme le dictateur romain, l’organe de la nécessité du moment, enfermé dans un cercle de conditions historiques, économiques, stratégiques, etc., qui lui tracent son mandat. L’élu du peuple, dans la pensée de l’Elysée, est affranchi de toutes considérations circonstancielles ; il agit dans l’indépendance absolue de ses inspirations. Il ne reçoit pas la loi des faits du dehors, il la produit du fond de sa prudence. Au lieu de chercher, comme nous l’avons fait, par une analyse infatigable, la nécessité de chaque jour, afin de la convertir en loi, et d’en procurer l’exécution ; il se crée à lui-même un idéal, que chacun de ses actes a pour objet de réaliser ensuite, et qu’il applique, d’autorité, à la nation. C’est ainsi que l’Eglise catholique, en vertu de la mission qu’elle s’attribue d’en-haut, tend incessamment à ramener la société à son type, sans tenir aucun compte des données de l’économie, de la philosophie et de l’histoire. Telle est l’humanité selon la foi, dit-elle ; rien en deçà, rien au-delà. Le 2 décembre suit exactement la même conduite. Il se meut dans une sphère d’idées à lui ; il gouverne d’après une certaine spontanéité de raison qui lui fait accepter ou rejeter l’enseignement des faits, suivant qu’il les juge conformes ou contraires h son propre dessein. Le 2 décembre, en un mot, se comporte avec le pays comme si le pays lui avait tenu ce langage : « J’ai été peu satisfait du système de la Restauration, de celui de Louis-Philippe, et j’ai peu profité de celui des républicains. Je vous charge maintenant d’appliquer le vôtre. Commandez, j’obéis.