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guerre, et c’est afin de s’assurer que ce devoir sera rempli que le vainqueur le met sous garde. Le soldat qui se rend sur le champ de bataille promet implicitement de ne plus combattre. S’il était prouvé que sa soumission n’est qu’une feinte, on le tuerait comme traître et assassin et ce serait justice. Mais la guerre terminée, le litige réglé, les prisonniers sont rendus de part et d’autre ; chacun rentre parmi les siens : voilà le droit, tout le droit, rien que le droit. Il n’y a pas autre chose.

Dans les deux dernières guerres, de Crimée et d’Italie, les puissances belligérantes, la France, la Russie, l’Autriche, se sont signalées à l’envi par la douceur avec laquelle elles ont traité leurs prisonniers réciproques : c’est un des traits qui prouvent le mieux combien la conscience des nations est au-dessus des théories de l’école, et de quelles améliorations la guerre, si on le voulait, serait encore susceptible. Mais des prisonniers massacrés, condamnés au service des bagnes, engloutis dans des pontons, transportés au fond des déserts à deux mille lieues de leur patrie : voilà ce que rien n’excuse, ce qui sort de toute loi et de tout droit, ce qui ne fait pas moins honte aux généraux et aux hommes d’état qui l’ordonnent qu’aux légistes qui, par leurs absurdes consultations, l’autorisent.


10. Des otages. — Autrefois, on avait la coutume de recevoir et de donner des otages pour servir de garantie aux conventions internationales et à l’observation des lois de la guerre. Je ne comprends pas pourquoi cette coutume a été abandonnée. On dit qu’il était inhumain de rendre des innocents responsables de la mauvaise foi de leurs concitoyens : en sorte que, les conseils de l’humanité prévalant, la garantie devenait nulle.

Mais ce n’est comprendre ni l’obligation imposée à l’otage, ni le sens des lois de la guerre. La guerre, qu’elle