Page:Proudhon - La Guerre et la Paix, Tome 2, 1869.djvu/80

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

force ; par conséquent, la guerre étant la lutte des forces, chaque puissance belligérante doit combattre avec ses propres forces, non avec les forces de l’étranger. Toute prestation de forces implique alliance et cessation de la neutralité ; c’est un cas de guerre.


8. Des mercenaires. — Pinheïro-Ferreira regarde l’emploi des mercenaires comme contraire au droit des gens. Le soldat mercenaire, dit ce publiciste, est censé avoir dit au gouvernement qui le paye : « Pourvu que vous me serviez ma solde, je vous obéirai, quelle que puisse être la justice ou l’injustice de l’emploi que Vous ferez de ma coopération. Des ce moment, elle vous est acquise sans restriction. » Pinheïro voudrait en conséquence que les mercenaires fussent passibles de la peine infligée aux pirates.

La guerre est la lutte des forces : elle n’implique par elle-même, de la part d’aucune des puissances en conflit, d’injustice. L’opinion de Pinheïro-Ferreira ne serait pas douteuse, si le mercenaire se mettait au service d’un pirate ; ou si, dans une guerre légitime, les citoyens capables de porter les armes pouvaient être considérés comme l’unique force des États. Mais la richesse aussi est une force, et de même qu’il est permis à un entrepreneur de prendre des travailleurs à loyer, des domestiques à gages, on ne voit pas pourquoi il serait défendu à une communauté d’entrepreneurs, de marchands, de laboureurs, en guerre avec une autre communauté, de louer aussi des soldats. C’est leur capital, transformé en armée, en vaisseaux, en canons, qui se bat. Le jugement de la guerre n’en sera pas faussé. L’assimilation du mercenariat militaire à un louage d’ouvrage me semble d’autant plus plausible que parmi ceux qui le réprouvent il en est qui n’admettent pas que le service militaire doive être réputé d’obligation pour tout citoyen. La profession des armes,