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droit à la pétition socialiste. Mais la réaction de juin 1848 et de décembre 1851 voulut davantage. On prétendit étouffer une demande qui ne pouvait être qu’ajournée, faire rendre à la victoire plus qu’elle ne pouvait donner. Dites-moi maintenant où en est cette France réactionnaire, et s’il n’eût pas mieux valu pour elle respecter le droit du vaincu que de porter atteinte, en exagérant ses prétentions, à sa propre liberté ?

La guerre, pour me résumer en quelques lignes, étant la mesure des forces, ayant pour conséquence le couronnement du plus fort, la subordination du plus faible, par cela seul sa législation est déterminée. Tout ce qui peut assurer la sincérité et l’honorabilité de la lutte, le triomphe légal de la force, est d’obligation à la guerre ; tout ce qui peut y porter atteinte, fausser la victoire, soulever les protestations de la défaite, envenimer les ressentiments, est défendu. Tel est le principe, dont le code de la guerre a pour but de régulariser dans le détail l’application.

A la guerre, comme aux jeux olympiques, comme aux tournois du moyen âge, il est des choses que l’honneur et la justice commandent aux combattants de s’interdire. Celui qui mord le bras de son adversaire afin de lui faire lâcher prise, est chassé de l’arène ; le duelliste qui frappe son ennemi par derrière avant que celui-ci se soit mis en garde, est réputé assassin. Il en est de même à la guerre. Si la guerre n’était qu’une chasse aux malfaiteurs et aux pirates, on conçoit que la gendarmerie envoyée contre eux employât tous les moyens pour les réduire, le fer et le feu, la violence et la ruse. Mais c’est une population laborieuse, paisible, soumise à justice, qu’il s’agit de révolutionner ; c’est une puissance politique, qu’une autre puissance peut avoir le droit, dans un cas donné, de soumettre à sa loi, mais qui n’en a pas moins aussi le droit de décliner cette subordination et d’opposer la force à la force. Soutenir que,