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avait d’abord accueilli avec une sympathie si marquée l’élan du peuple italien pour sa régénération, s’est montré quelque peu froissé de l’empressement avec lequel le roi Victor-Emmanuel a profité de cet élan pour s’emparer successivement des états des ducs, du Pape et du roi de Naples. On a vu dans cette conduite plus d’ambition que de patriotisme. On savait gré au jeune roi François II de son acquiescement, bien qu’un peu tardif, au désir de ses sujets d’obtenir une constitution ; on lui tenait compte de sa proposition d’alliance avec le nouveau roi d’Italie. Sa belle défense, enfin, lui concilia partout des sympathies. On n’est pas convaincu, d’ailleurs, que l’Italie soit appelée à former une grande puissance unitaire, d’autant moins que sur cette grosse question les chefs intellectuels de l’Italie sont divisés. On est las, enfin, de toutes ces infractions, au moins apparentes, tant au droit coutumier qu’au droit écrit de l’Europe. Que dit maintenant la raison de la force ?

La force est aussi incapable de se tromper que de se déjuger. On peut abuser d’elle ; on peut jusqu’à certain point s’y soustraire : par elle-même elle est infaillible.

Remarquez d’abord que dans l’état actuel de l’Europe, il y a tendance partout à l’unité et à la centralisation du gouvernement. La Grande-Bretagne, en dépit de son génie individualiste, a donné, depuis la fin des grandes guerres, des preuves nombreuses de sa tendance centralisatrice, et ce mouvement ne fera que s’accroître sous l’action de la démocratie sociale, présentement en train de s’organiser. La Belgique, non moins libérale que l’Angleterre, est engagée dans la même voie. L’Allemagne, tant bourgeoise que plébéienne, appelle à grands cris la réunion. L’Autriche n’eût peut-être pas manqué son entreprise d’unification, si elle l’avait fait précéder d’une réforme politique, conçue dans l’esprit de l’époque, je veux dire des traités mêmes de 1815. Un jour viendra, qui peut-être