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et profondément l’influence des barbares, celle de Constantinople, celle des Allemands, des Français, des Espagnols, des Arabes. Elle a été le point de mire d’une foule d’aventuriers qui y ont laissé une forte trace. C’est, après un travail révolutionnaire de près de mille ans, le plus grandiose qui se soit jamais vu ; après les corruptions des quinzième, seizième, dix-septième et dix-huitième siècles, qui l’ont suivi, que l’Italie épuisée est tombée dans cette léthargie qui l’a rendue la fable des nations, et qui a fait d’elle, selon le mot de M. Metternich, une expression géographique à la disposition du plus fort. Occupée par les Français de 1797 à 1814, elle était retombée, en vertu des traités de 1814-1815, partie sous la domination de l’Autriche, partie sous des princes qui en suivaient la politique et se glorifiaient de sa suzeraineté.

Cette situation de l’Italie, dans l’état de densité, de pénétration mutuelle et de solidarité où vivent les nations de l’Europe, était inévitable ; elle était juste. Le peuple qui ne peut parvenir à se constituer politiquement, qui est incapable de soutenir l’agression des autres, leur crée, par sa faiblesse même, un droit à la suprématie. Il ne peut prétendre à l’indépendance ; il serait un danger pour les autres, un principe de dissolution, s’il n’obéissait.

L’Italie subissait donc la condition réservée aux sociétés inertes, ambiguës ou contradictoires. N’ayant pas de principes politiques, précisément parce qu’elle suivait des principes divergents, elle était destituée de vie politique. Ce qui lui arrivait était logique, et je le répète, au point de vue du droit des gens, c’était juste.

Mais voici qu’à partir de 1814 et 1815, sous l’influence des idées qui avaient fait la Révolution française, un nouvel esprit commence à se développer en Italie. Les plus intelligents se mettent à étudier les causes de la décadence de leur pays et les moyens de le régénérer. A l’an-