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pour arriver à l’être. On va voir comment le publiciste anglais effectue la traversée.

Après avoir donné cette définition du droit, Hobbes la développe intrépidement.

Qui veut la fin veut les moyens, dit notre auteur. Celui qui a droit, en autres termes celui à qui sa droite raison commande de protéger à tout prix son corps et ses membres, la même droite raison lui commande aussi d’employer pour cela tous les moyens possibles.

Ce mot de droite raison, employé par Hobbes pour justifier, à l’état de nature, le vol et l’assassinat, a pour nous quelque chose de révoltant. Mais il faut comprendre la pensée et envisager surtout le but de l’écrivain, qui est de nous faire sortir, le plus tôt qu’il pourra, de cet état de nature où la droite raison nous commande de voler et d’assassiner ; puis, en vertu de cette même droite raison, de nous élever à un état supérieur, dans lequel il nous sera commandé tout à l’heure d’observer la paix et la fidélité au serment. La droite raison, chez Hobbes, est l’équivalent de la ligne droite des géomètres : c’est le plus court chemin par lequel l’homme, placé sous la seule loi de conservation, peut arriver à son but.

Nous disons donc que la droite raison nous commande d’employer, pour nous sauvegarder, tous les moyens possibles. De savoir maintenant, parmi tant de moyens qui peuvent s’offrir, quels sont ceux qu’il conviendra d’employer, c’est, dit Hobbes, ce dont chacun de nous reste seul juge pour ce qui le regarde, en vertu de son droit naturel.


« Car, s’il était contraire à la droite raison que je jugeasse moi-même de ce qui regarde ma sûreté, un autre sans doute en jugerait. Si un autre juge de ce qui me regarde, je puis juger à mon tour de ce qui le regarde,