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diverses laisse des regrets. On peut souhaiter de voir le jour de la réunion des peuples dans l’unité. Heureux jour, où le triste nom d’étranger s’effacerait des langues humaines, emportant avec » lui des luttes d’intérêts et de principes que le patriotisme exclusif traduit en guerres. »


C’est aussi l’opinion de M. Vergé, éditeur et commentateur de Martens. L’idée de patrie, selon lui, est négative du droit des gens. D’après ce principe, il écrit :


« Les croisades ne sont-elles pas la négation du droit des gens ? Au lieu de la patrie grecque et de la patrie romaine, on eut la patrie chrétienne. »


Ainsi la patrie n’est plus rien, la nationalité rien, l’autonomie des races, la distinction des peuples, la détermination des états, rien.

Ainsi les Alexandre, les César, les Charlemagne, les Charles-Quint, les Philippe II, les Louis XIV, les Napoléon, tous ces candidats à la monarchie universelle, ces destructeurs de patries, de libertés nationales et individuelles, étaient les bienfaiteurs du genre humain, les vrais représentants du droit. Les héros qui les combattirent, un Memnon, un Vercingétorix, un Witikind, un Guillaume le Taciturne, un Gustave-Adolphe, un Guillaume III, un Kosciuzko, un Wellington, des révoltés contre la Providence, des ennemis du droit des gens, dignes de toutes les amertumes de la défaite et des flétrissures de l’histoire. Car, de l’autorité seule découle le droit ; et puisque l’Être suprême n’a pas daigné établir son siége entre les nations, que pouvons-nous faire de mieux que de suppléer à cette absence du Dieu de l’ordre, en créant, par une centralisation des cinq parties du globe, l’omniarchie de la terre ?