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du Pouvoir, corriger l’abus, en un mot, par l’abus même.

Cette fascination dominant les intelligences, la Société tourne dans un cercle de déceptions, poussant le capital à une agglomération toujours plus écrasante, l’État à une extension toujours plus tyrannique de ses prérogatives, la classe travailleuse à une déchéance physique, morale et intellectuelle, irréparable.

Dire que la Révolution de 89, n’ayant rien fondé, ne nous a point affranchis, mais seulement changés de misère ; dire, en conséquence, qu’une Révolution nouvelle, organisatrice et réparatrice, est nécessaire pour combler le vide creusé par la première : c’est pour beaucoup de gens avancer une proposition paradoxale, scandaleuse, pleine de troubles et de désastres. Les partisans plus ou moins nantis du régime constitutionnel n’en conviennent pas ; les démocrates attachés à la lettre de 93, et qu’une pareille besogne épouvante, s’y opposent. Suivant les uns et les autres, il n’existe que des souffrances accidentelles, dues surtout à l’incapacité des dépositaires du pouvoir, et qu’une démocratie vigoureuse guérirait. De là l’inquiétude, pour ne pas dire l’antipathie que leur inspire la Révolution, et cette politique réactionnaire où ils se sont engagés après février.

Cependant l’évidence des faits est telle, les statistiques et les enquêtes ont si fort élucidé la matière, qu’il y a désormais sottise ou mauvaise foi à argumenter d’une politique meilleure, là où tout accuse la contradiction et l’impuissance du Gouvernement.

C’est à la place même de ce régime gouvernemental, féodal et militaire, imité de celui des anciens rois, qu’il faut élever l’édifice nouveau des institutions industrielles ; c’est à la place de cette centralisation ma-