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mois, la plus terrible époque que vous traversâtes jamais, le gouvernail fut entre les mains de tribuns populaires. Que surent-ils faire de ces quatorze mois de dictature pour leurs pauvres clients ? Hélas ! rien. Présomptueux, comme toujours, et bavards, leur effort se réduisit à continuer, tant bien que mal, votre besogne. En 1793, comme en 1848, les élus du peuple, — qui la plupart n’étaient pas du peuple, — n’eurent de souci que pour la propriété ; ils ne songèrent point au travail. Hors la résistance à l’étranger, la puissance gouvernementale fut consacrée tout entière à la garantie de vos intérêts. Vous n’en fûtes pas moins blessés de cette atteinte à votre vieille prérogative. Parce que le peuple n’avait su, dans son inexpérience, faire marcher la révolution par vous inaugurée, dès le lendemain de thermidor vous parûtes renier cette révolution. Ce fut pour notre pays une halte dans le progrès, et le commencement de nos expiations. Le prolétaire crut se venger en imposant à votre orgueil, par ses suffrages, l’autocratie d’un héros. Vous aviez semé la résistance, vous recueillîtes le despotisme. La Liberté fut remplacée par la Gloire, la plus funeste, la plus sotte des divinités. Pendant quinze ans la tribune fut muette, la bourgeoisie humiliée, la Révolution enchaînée. Enfin, grâce à vous, la Charte de 1814, arrachée, non octroyée, quoi qu’on ait dit, la re-