Page:Proudhon - Idée générale de la Révolution au dix-neuvième siècle.djvu/64

Cette page a été validée par deux contributeurs.

chaque année et destinées à la consommation, 6 milliards, s’il faut en croire l’estimation d’un savant économiste, M. Chevé, sont prélevés par le parasitisme, c’est-à-dire la finance, la propriété abusive, le budget et ses satellites ; le reste, soit 4 milliards, est laissé aux travailleurs. Un autre savant économiste, M. Chevalier, divisant le produit présumé du pays par trente-six millions d’habitants, a trouvé que le revenu, par tête et par jour, était en moyenne de 65 centimes ; et comme de ce chiffre il faut déduire de quoi payer l’intérêt, la rente, l’impôt et les frais qu’ils entraînent, M. de Morogues, encore un autre savant économiste, a conclu de là que la consommation journalière, pour une grande partie des citoyens, était au-dessous de 25 centimes. Or, puisque les redevances, de même que l’impôt, vont sans cesse grandissant, tandis que par la désorganisation économique le travail et le salaire diminuent, il s’ensuit que, d’après les susdits savants économistes, le bien-être matériel des classes laborieuses suit une progression décroissante que l’on peut représenter par la série des nombres 65, 60, 55, 50, 45, 40, 35, 30, 25, 20, 15, 10, 5, 0 ; - 5 - 10 - 15, etc. Cette loi d’appauvrissement est le corollaire de celle de Malthus : on en trouvera les éléments dans tous les livres de statistique.

Certains utopistes attaquent la concurrence ; d’autres récusent la division du travail et tout le régime industriel ; les ouvriers, dans leur brutale ignorance, s’en prennent aux machines. Personne jusqu’à ce jour ne s’est avisé de nier l’utilité et la légitimité du crédit. Il est incontestable cependant que la dépravation de ce principe est la cause la plus active de la misère des masses ; sans elle, les fâcheux effets de la division du travail, de l’emploi des machines, de la concurrence,