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ral Cavaignac, qu’ils soutiennent en ce moment la Constitution attaquée, et répudient les socialistes avec leurs systèmes. Pure équivoque ! Le commerçant, le fabricant, le manufacturier, le propriétaire agriculteur, tout ce qui, dans la haute et moyenne bourgeoisie, a charge de patente et d’hypothèque, et qui travaille sous sa propre responsabilité, se soucie peu, au fond, de la politique et de la forme du gouvernement. Ces gens-là demandent à vivre, et à vivre bien : ils sont révolutionnaires jusqu’à l’âme ; seulement, ils cherchent à une fausse enseigne la Révolution.

Jusqu’à présent, on leur a fait croire que l’ordre politique, l’ordre dans la rue, tel que le fait le Gouvernement, pouvait seul leur procurer ce qu’ils demandent ; ils ont vu dans les conservateurs du pouvoir les conservateurs de leurs intérêts, et ils se sont séparés de la Révolution, d’abord tapageuse, bigote, exclusive, mal coiffée surtout. Quand donc les journaux aimés de cette bourgeoisie, le Siècle, qui depuis la mort de Louis Perrée s’allanguit ; la Presse, trop souvent en déroute ; le National, toujours en expectative, se décideront-ils à désabuser leur clientèle ? Sans doute, la nécessité de poser d’abord la Révolution au point de vue spécial du prolétariat, a dû tenir pendant quelque temps la classe moyenne en méfiance ; elle a cru qu’il s’agissait tout uniment de faire les prolétaires bourgeois, et les bourgeois prolétaires. Aujourd’hui, la question est trop éclairée pour qu’une pareille scission se prolonge davantage.

Qui donc fera accroire au commerce, à l’industrie, à la petite propriété, à toutes les classes dont le travail produit plus que le capital, qu’elles ont quelque chose à craindre d’une révolution qui, mettant le crédit à 1/4 p. %, liquidant les dettes de l’État et les hypo-