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fortune du maître, il a augmenté proportionnellement sa propre charge ; il a donné la verge, comme l’on dit, pour se faire fouetter.

Cette injustice a été comprise du paysan ; et plutôt que de n’en pas obtenir réparation, il brisera tôt ou tard gouvernement et propriété, comme en 89 il brûla les chartriers. On peut désormais s’y attendre. D’un autre côté, quelques propriétaires ont également senti la nécessité de faire jouir enfin le travail de ses propres œuvres ; ils sont allés au-devant des désirs de leurs fermiers, et ont commencé spontanément cette œuvre de réparation. Le Droit à la plus-value est un des premiers que le législateur devra reconnaître, au moins en principe, à peine de révolte et peut-être d’une jacquerie.

Quant à moi, je ne crois point que, dans le système de nos lois et l’état des propriétés, une pareille innovation soit praticable, et je doute que l’espoir des paysans triomphe des difficultés et des complications sans nombre de la matière. Je suis le premier à reconnaître la légitimité du droit à la plus-value, mais autre chose est de reconnaître le droit, et autre chose de faire droit ; et celui-ci est incompatible avec toutes les lois, traditions et usages qui régissent la propriété. Il ne faudrait pas moins qu’une refonte complète, avec suppressions, additions, modifications, presque à chaque phrase et à chaque mot, des deuxième et troisième livres du Code civil, dix-sept cent soixante-six articles à reviser, discuter, approfondir, abroger, remplacer, développer, plus de travail que n’en pourrait faire l’Assemblée nationale en dix ans.

Tout ce qui concerne la distinction des biens, le droit d’accession, l’usufruit, les servitudes, successions, contrats, prescriptions, hypothèques, devra être