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On sait trop aujourd’hui que n’appartenant à aucun parti, repoussant toutes les écoles, je n’ai pas de public à qui je puisse adresser des instructions et des ordres du jour. Je dis ce qui est, conséquemment ce qui sera : je n’ai de raison d’écrire que la vérité qui me frappe, et le désir d’éclairer sur leur situation mes compatriotes et mes contemporains.

Comment et dans quel ordre se poseront les questions ? Combien durera l’élaboration révolutionnaire ? Tout finira-t-il par une nuit du 4 août, ou par une suite de victoires de la révolution sur la contre-révolution ? Quelles transactions seront faites ? Quels délais, quels ajournements accordés ? Quelles modifications aux principes les partis, les sectes et les amours-propres feront-ils prévaloir ? Quels épisodes, parlementaires, administratifs, électoraux, militaires, viendront animer, embellir cette épopée ? — Je l’ignore ; je ne sais absolument rien de ces choses. Encore une fois, je ne suis pas plus un diseur de bonne aventure, qu’un homme de parti ou de secte. Je tire, d’après le présent, les conséquences générales de l’avenir : ce sont quelques feuillets du livre de la Destinée que je jette aux vents. Cela sera, voilà ce que je puis dire, parce que c’est écrit, et que nous ne pouvons pas l’empêcher. Mais de quelle manière cela se fera, je ne le saurais prévoir, attendu que nous en sommes parfaitement les maîtres, et que sur ce point notre libre arbitre est juge en dernier ressort.

Je supplie donc mes lecteurs de ne pas juger tout à fait de mes sentiments d’homme, d’après mes convictions d’historien. Plus d’une fois il m’arrivera de soutenir, au point de vue de la nécessité des choses, telle mesure sur laquelle, si je n’écoutais que mon cœur, je transigerais peut-être : scission pour moi doulou-