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aurore : à une démocratie inextricable succédera, sans autre transition, l’empire, avec ou sans Napoléon.

Il faut sortir de ce cercle infernal. Il faut traverser, de part en part, l’idée politique, l’ancienne notion de justice distributive et arriver à celle de justice commutative qui, dans la logique de l’histoire, comme dans celle du droit, lui succède. Eh ! aveugles volontaires, qui cherchez dans les nues ce que vous avez sous la main, relisez vos auteurs, regardez autour de vous, analysez vos propres formules, et vous trouverez cette solution, qui traîne depuis un temps immémorial à travers les siècles, et que ni vous ni aucun de vos coryphées n’avez jamais daigné apercevoir.

Toutes les idées sont coéternelles dans la raison générale : elles ne paraissent successives que dans l’histoire, où elles viennent tour à tour prendre la direction des affaires, et occuper le premier rang. L’opération par laquelle une idée est chassée du pouvoir s’appelle en logique négation ; celle par laquelle une autre idée s’établit, se nomme affirmation.

Toute négation révolutionnaire implique donc une affirmation subséquente ce principe, que démontre la pratique des révolutions, va recevoir ici une confirmation merveilleuse.

La première négation authentique qui ait été faite de l’idée d’autorité est celle de Luther. Cette négation, toutefois, n’est pas allée au delà de la sphère religieuse : Luther, de même que Leibnitz, Kant, Hegel, était un esprit essentiellement gouvernemental. Sa négation s’est appelée libre examen.

Or, que nie le libre examen ? — l’autorité de l’Église.

Que suppose-t-il ? — l’autorité de la raison.

Qu’est-ce que la raison ? — un pacte entre l’intuition et l’expérience.