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ÉVOLUTION HISTORIQUE

De ces observations générales je tire deux conséquences de la plus haute importance pour le développement de l’art, La première, c’est que l’art ne s’est pas plutôt manifesté dans une agglomération d’hommes tant soit peu régulière, qu’il reçoit une fission sociale, politique et religieuse : en Egypte, ce n’est pas moins que l’écriture, l’histoire, la chronologie, le dogme, la métaphysique, la morale, exprimés par des représentations plus ou moins poétiques et artistement exécutées : instruction élémentaire et supérieure, excitation du patriotisme, attestation des dieux, tout ce qu’il y a de meilleur dans la société est de son ressort. La seconde conséquence, beaucoup moins remarquée que la première, c’est que l’art, devenant un moyen de civilisation, un instrument à la fois politique et religieux, dirigé par le sacerdoce, formant école enfin, acquiert peu à peu, par la communauté des pensées et la constance des traditions, une force de collectivité qui le porte fort au-dessus du niveau individuel. Il n’est pas douteux, par exemple, que c’est grâce à cette force de collectivité que l’art égyptien, malgré les étroites limites dans lesquelles il paraît s’être volontairement retenu, quant à son idéal, à son exécution et à ses moyens, a acquis une originalité et une vigueur de style que l’anarchie esthétique n’eût jamais su produire. Eh quoi ! nous savons quels efforts produisent, par le groupement des forces et le concours