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ÉGYPTE : ART TYPIQUE

L’art fleurit aux époques d’institution religieuse, de réforme morale, de révolution politique ou philosophique. Cela est facile à comprendre : l’art est lui-même l’expression des réformes, qui toutes se résolvent en un mot : la production de la justice, la création de l’humanité. Ainsi la Renaissance et la Réforme conjurées ont eu pour pendant une explosion artistique et littéraire dans toute l’Europe ; ainsi la révolution philosophique de Descartes et de Kant a amené la réforme littéraire en France et en Allemagne. Les mêmes conditions qui font les grands penseurs et les grands écrivains nous redonneront de grands artistes, et l’école de l’avenir, une fois instituée, ne faiblira plus.

L’artiste, comme le littérateur, doit être de son temps : ce n’est qu’à cette condition que ses œuvres passeront à la postérité ; — il doit être de son pays[1] : par là seulement il sera humanitaire ; — il doit être de sa religion (opinion), s’il,tient à être véridique et admiré des philosophes ; — il doit se montrer concret dans son idée : ce n’est que par là qu’il aura un idéal.

  1. Une question sort de là : est-il bon à l’artiste de voyager sans cesse ? Je ne le crois pas ; il n’est pas fait pour rendre l’homme universel, ni le paysage ou éden universel ; il a été organisé pour exprimer une idée, une forme, qui généralement est celle de son pays et de ses contemporains. Courbet est bien le peintre d’Ornans, du paysage d’Ornans, des paysans de Flagey. C’est ce qui fait sa force. C’est par là aussi qu’il est le railleur impitoyable de la bourgeoisie de son temps et des moeurs parisiennes.