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ÉVOLUTION HISTORIQUE

dont elle est témoin, elle prie Dieu de pardonner à ses fragiles ministres, qu’elle promet d’écouter toujours comme les dispensateurs de ses grâces, investis par lui-même du pouvoir de lier et d’absoudre.

Remarquez les oppositions que l’artiste, sans les chercher, a répandues dans son œuvre : la vulgarité de la scène contrastant avec la beauté du paysage ; le comique de la situation avec la gravité de la profession ; la superstition de la paysanne avec l’indévotion de son mari ; l’âne avec celui qui le monte, etc. Le paysan, trapu, osseux, couleur de terre, ajoute, par son hilarité triviale, au scandale donné par les hommes d’église, aux corps bien nourris,aux joues potelées et relevées de vermillon. La femme, carrée, courtaude, déprimée dans son corps et dans son âme, créature sacrifiée, n’est point faite, il s’en faut, pour relever par l’idéalisme de sa personne l’inconduite des acteurs principaux. Qui dira ce que pensent, ce que sentent ces servantes de curés, êtres neutres, en qui l’air de la sacristie a tué, avec la piété vraie, tout sentiment féminin ? Cela n’a ni cœur ni âme : vieilles filles qui ont appris le vice sans l’amour, la bigoterie sans la religion. La plus étonnante figure du tableau est peut-être celle de l’âne, qu’on serait tenté de déclarer le plus raisonnable de tous, zôon logicon, si son humeur récalcitrante m nous avertissait qu’il est incurable dans son ânerie, et qui semble placé là pour symboliser l’abêtis-