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ÉVOLUTION HISTORIQUE

ception, mais banale dans ses élégances, commune avec sa recherche ; une œuvre sans originalité, sans portée, sans idée, nulle pour l’art, inutile aux hommes du présent et à ceux de l’avenir. Eh ! que ne donnerions-nous pas pour contempler aujourd’hui dans leur vie intime, dans leurs occupations domestiques et leurs affaires de ménage, les Romains du temps de Fabricius et des Scipions ; les Grecs de Solon, de Thémistocle, de Périclès ; les Carthaginois d’Annibal et les Gaulois de Vercingétorix ! Quel commentaire pour l’histoire ! quelle révélation pour la science des mœurs ! Peut-être disparaîtrons-nous à notre tour de la scène du monde : ce qui est indubitable, c’est que d’ici à quelques siècles nous aurons changé. Dans trois cents ans, notre postérité ne nous ressemblera pas plus que les Flamands et les Hollandais d’aujourd’hui ne ressemblent, pour le costume, les pensées, les mœurs, aux contemporains de Rubens et de Rembrandt. Croyez-vous qu’alors des tableaux comme celui de Courbet n’acquièrent pas, aux yeux des générations futures, comme souvenirs de famille, et abstraction faite du talent de l’artiste, cent fois plus de valeur que toutes les fantaisies et illustrations des David, des Delacroix et des Ingres ?

Le tableau des Paysans de Flagey est, au jugement de ceux qui soutiennent de leur approbation la nouvelle peinture, un des meilleurs de Courbet. Exposé au Salon de 1851, avec les Casseurs de pierres et l’Enter-