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ÉGYPTE : ART TYPIQUE

tout simplement aujourd’hui un accompagnement de la volupté ? Nos consciences sont gangrenées ; nos mœurs sont épouvantables : comment y aurait-il de vrais artistes ? — Et c’est aussi ce qu’affirment nombre d’écrivains, qui, en dehors de la question d’art, soutiennent que le moment de l’efflorescence morale de l’humanité est le même que celui de l’efflorescence esthétique : en sorte que la civilisation serait décidément sur le retour, et que nous n’avons plus, nous autres qui ne croyons à rien de beau ni de bon, qu’à choisir entre deux partis : nous recueillir dans la mort si nous sommes pauvres, ou nous livrer au plaisir si nous sommes riches, selon le précepte de Sardanapale : Mange, bois, jouis.

Il est permis d’appeler de cette condamnation. Si le lecteur a suivi avec quelque attention le développement de notre pensée, il doit se dire que la dépression actuelle de l’art n’a nullement pour cause, comme le suppose M. Chenavard, l’affaiblissement, déterminé par l’âge, de la faculté esthétique dans la société ; sous ce rapport, M. Chenavard a mal diagnostiqué et mal vu. Cette dépression de l’art a pour cause le défaut de rationalité qui s’est manifesté, depuis l’époque de la Renaissance, dans le domaine de l’art, et qui a surtout sévi, ainsi que nous venons de le constater nous-même (chap. x), depuis la Révolution. En un mot, ce n’est point à une-dépravation du goût, à