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ÉVOLUTION HISTORIQUE

qu’eux, avec leur érudition, en sont à savoir que, chaque génération ayant sa manière de voir, par conséquent de sentir, l’idéal der l’une n’est pas celui de l’autre, et que le véritable artiste est celui qui répond le mieux à l’esthésie de ses contemporains. Entrepreneurs d’imitations, de contrefaçons, de pastiches, de bric-à-brac, il n’y a qu’une chose à laquelle ils ne paraissent pas tenir, qui est d’être eux-mêmes et de révéler leur idée. Or, comme l’artiste, quoi qu’il fasse, ne peut en définitive que se produire lui-même, avec le milieu auquel il fait écho, vous voyez l’art marcher de pair avec la littérature et la politique, la décadence du goût suivre celle des idées et des mœurs ; ce n’est plus que mensonge, hypocrisie, cynisme plus ou moins enluminé, vernissé, illustré, en termes d’atelier, pose et blague, servant de couverture à la prostitution.

N’est-ce pas la tristesse de cette situation qui a suggéré à M. Chenavard sa théorie de l’affaiblissement progressif de l’art, de laquelle il déduit celle de la fin prochaine de l’humanité ?

« Nous avons vu, dit ce savant artiste, reparaître en moins d’un demi-siècle, dans les ouvrages des imitateurs, — à commencer par David, qui remontait aux sources de l’antique, jusqu’à Courbet, qui tend à faire revivre le naturalisme flamand, — toutes les physionomies mises l’une après l’autre à la mode durant deux mille ans. L’art moderne n’est autre chose qu’un jeu de