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ÉVOLUTION HISTORIQUE

l’enthousiasme des représentants et qui n’applaudissent par conséquent à l’œuvre de David, la plus considérable peut-être qui soit sortie de son cerveau. Oui, voilà ce que furent nos pères en 89, ce qu’ils ont voulu ; et nous, leur postérité, nous ne leur avons pas refusé notre ratification. Pourtant il plane un doute sur ce grand acte, doute que l’artiste a rendu avec une éloquence incomparable, mais qui, atteignant la moralité de l’acte, rejaillit sur la composition. A la distance où nous sommes des faits et à la vue des événements qui en ont été la conséquence, on se demande si la démarche des députés du tiers fut bien raisonnée ; si elle était utile ; si l’assemblée, composée en grande partie de légistes, et qui jusqu’à ce moment se piquait d’observer la plus stricte légalité, ne s’en écartait pas en prêtant ce serment insurrectionnel : si la marche ultérieure de la Révolution ne s’en est pas ressentie, au point de faire regretter aujourd’hui qu’on n’ait pas suivi une autre route. Est-il sûr que ce député assis, pendant que ses collègues, debout, le bras tendu vers Bailly, prêtent le serment fatidique, n’avait pas raison seul contre tous ? MARTIN (d’Auch), c’est le nom de ce député, si j’ai bonne mémoire, dont le peintre David a eu soin de consacrer la protestation isolée, en témoignage du respect des opinions, apparaît ici comme le remords au sein de la conscience nationale. Les députés jurent de ne se séparer qu’après