Page:Proudhon - Du Principe fédératif.djvu/82

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.



Le problème politique, avons-nous dit Chap. Ier, ramené à son expression la plus simple, consiste à trouver l’équilibre entre deux éléments contraires, l’Autorité et la Liberté. Toute fausse balance se traduit immédiatement, pour l’État en désordre et ruine, pour les citoyens en oppression et misère. En autres termes, les anomalies ou perturbations de l’ordre social résultent de l’antagonisme de ses principes ; elles disparaîtront quand les principes seront coordonnés de telle sorte qu’ils ne se puissent plus nuire.


Équilibrer deux forces, c’est les soumettre à une loi qui, les tenant en respect l’une par l’autre, les mette d’accord. Qui va nous fournir ce nouvel élément, supérieur à l’Autorité et à la Liberté, et rendu par leur mutuel consentement la dominante du système ? — Le contrat, dont la teneur fait droit, et s’impose également aux deux puissances rivales[1].

  1. Il y a trois manières de concevoir la loi, selon le point de vue où se place l’être moral et la qualité qu’il prend lui-même, comme croyant, comme philosophe et comme citoyen.
    …...La loi est le commandement intimé à l’homme au nom de Dieu par une autorité compétente : c’est la définition de la théologie et du droit divin.
    …...La loi est l’expression du rapport des choses : c’est la définition du philosophe, donnée par Montesquieu.
    …...La loi est le statut arbitral de la volonté humaine (De la Justice dans la Révolution et dans l’Église, 8e Étude) : c’est la théorie du contrat et de la fédération.
    …...La vérité étant une, bien que d’aspect variable, ces trois définitions rentrent l’une dans l’autre et doivent être regardées au fond comme identiques. Mais le système social qu’elles engendrent n’est pas le même par la première, l’homme se déclare sujet de la loi et de son auteur ou représentant ; par la seconde, il se reconnaît partie intégrante d’un vaste organisme ; par la troisième, il fait la loi sienne et s’affranchit de toute autorité, fatalité et domination. La première formule est celle de l’homme religieux ; la seconde celle du panthéiste ; la troisième celle du républicain. Celle-ci seule est compatible avec la liberté.