Page:Proudhon - Du Principe fédératif.djvu/66

Le texte de cette page a été corrigé et est conforme au fac-similé.

jusqu’à ce jour, il n’en est pas un qui, s’il était condamné à subsister par sa vertu propre, vivrait âge d’homme. Chose étrange, les chefs d’États et leurs ministres sont de tous les hommes ceux qui croient le moins à la durée du système qu’ils représentent ; jusqu’à ce que vienne la science, c’est la foi des masses qui soutient les gouvernements. Les Grecs et les Romains, qui nous ont légué leurs institutions avec leurs exemples, parvenus au moment le plus intéressant de leur évolution, s’ensevelissent dans leur désespoir ; et la société moderne semble arrivée à son tour à l’heure d’angoisse. Ne vous fiez pas à la parole de ces agitateurs qui crient, Liberté, Égalité, Nationalité : ils ne savent rien ; ce sont des morts qui ont la prétention de ressusciter des morts. Le public un instant les écoute, comme il fait les bouffons et les charlatans ; puis il passe, la raison vide et la conscience désolée.


Signe certain que notre dissolution est proche et qu’une nouvelle ère va s’ouvrir, la confusion du langage et des idées est arrivée au point que le premier venu peut se dire à volonté républicain, monarchiste, démocrate, bourgeois, conservateur, partageux, libéral, et tout cela à la fois, sans craindre que personne le convainque de mensonge ni d’erreur. Les princes et les barons du premier Empire avaient fait leurs preuves de sans-culottisme. La bourgeoisie de 1814, gorgée de biens nationaux, la seule chose qu’elle eût comprise des institutions de 89, était libérale, révolutionnaire même ; 1830 la refit conservatrice ; 1848 l’a rendue réactionnaire, catholique, et plus que jamais monarchique. Actuellement ce sont les répu-